En 1996, les ordonnances Juppé mettaient fin au paritarisme dans la gestion de l’Assurance Maladie.
Avec le PLFSS 2026, c’est désormais le dialogue conventionnel qui risque d’être remis en cause.
Depuis des décennies, les syndicats médicaux ont construit, en partenariat d’abord avec les représentants des cotisants, puis avec ceux de l’État au sein de la CNAM, un fonctionnement conventionnel qui a permis à notre système de soins d’être longtemps cité en exemple.
Mais les politiques publiques irresponsables de ces dernières années ont provoqué une crise démographique médicale sans précédent, entraînant une dégradation inacceptable de l’accès aux soins.
La convention médicale, signée en juin 2024, avait pour objectif de répondre à cette problématique, en conciliant amélioration de l’accès aux soins et soutenabilité financière du système de santé.
Le dialogue conventionnel reste le seul moyen d’assurer un équilibre entre les droits et les devoirs des médecins, en particulier des médecins libéraux, acteurs essentiels du premier recours qui assurent 80 % des consultations et 75 % des actes techniques.
Or, le PLFSS 2026 vient fragiliser cette dynamique :
- Un ONDAM de ville à 0,9 %, inférieur à l’inflation, contre 2,4 % pour l’hôpital, constitue une véritable pénalisation de la médecine libérale, pourtant pilier du premier recours.
- L’article 24 stigmatise à nouveau certaines spécialités, cette fois les radiothérapeutes et les néphrologues, après les biologistes et les radiologues l’an dernier. Il permet surtout au Directeur général de la CNAM de réviser unilatéralement la valeur des actes, rompant ainsi le dialogue et la confiance.
Les textes législatifs doivent fixer un cadre général, non se substituer à la négociation conventionnelle. L’article 24 doit donc être supprimé, faute de quoi nous entrerions dans une médecine administrée, étatisée, aggravant encore les difficultés d’accès aux soins.
Comment dénoncer, dans le même temps, le manque de rentabilité des centres de santé et fragiliser la médecine libérale, pourtant plus efficiente, par une insécurité grandissante de son exercice ?
C’est la convention médicale qui doit permettre les ajustements nécessaires, notamment dans la révision de la CCAM technique actuellement en cours.
De même, l’article 26, qui stigmatise le secteur 2, doit être supprimé.
Il faut au contraire construire, dans le cadre conventionnel, un espace de liberté tarifaire solvabilisé.
Les dépassements abusifs doivent être sanctionnés, mais lorsque les finances publiques ne permettent plus de valoriser les actes médicaux à leur juste niveau – comme le rappelait Raymond Barre en 1980 lors de la création du secteur 2 -, cet espace de liberté est indispensable.
La grave crise politique que traverse notre pays ne doit pas conduire, par des mesures précipitées ou idéologiques, à mettre en péril la médecine libérale.
C’est au contraire en faisant vivre la convention médicale, signée par des syndicats libéraux et responsables – au premier rang desquels la CSMF – que nous pourrons garantir l’accès aux soins et relever les défis actuels.
Docteur Bruno Perrouty
Président Les Spécialistes CSMF